jeudi 22 janvier 2009

Journal d’adolescence


En avril 2008, nous avons eu droit à la superbe réédition

du Journal d’adolescence de Virginia Woolf dans la collection

« La Cosmopolite » aux éditions Stock.

Il s’agit d’un magnifique volume de 502 pages, agrémenté

d’un arbre généalogique détaillé qui permet de mieux situer

la nombreuse parenté de Virginia.

La couverture reprend le célèbre portrait photographique

exécuté en 1902 par George Charles Beresford, alors que

l’édition anglaise la plus récente publiée par Pimlico en 2004

est illustré par le cliché de 1902 représentant Virginia avec

son père Sir Leslie Stephen (Cliché de la note du 3 novembre

2008 : Virginia Woolf en 2008)


Le Journal d’adolescence (1897-1909) est après la publication

de 1993, la deuxième édition française du texte original publié

par la Hogarth Press en 1990 sous le titre :

« A Passionate Apprentice : The Early Journals, 1897-1909 »


La traduction est de Marie-Ange Dutartre et ce Journal contient

une brève présentation de Geneviève Brissac et surtout la très

riche préface de Mitchell A. Leaska pour l’édition anglaise de 1990.


La lecture de ce journal qui se situe chronologiquement entre

Le journal de Hyde Park Gate (L’enfance) et le Journal intégral

de l’âge adulte, est un pur bonheur, tellement la fantaisie et la

justesse de Virginia Woolf sont déjà présents en toute liberté.


J’adore quand Miss Stephen raconte le voyage qu’elle fit en

Grèce, accompagnée de ses frères, sa sœur et Violet Dickinson.

Virginia n'a que 24 ans mais la précision de son style est

déjà inimitable. Arrivée à Olympie, le 14 septembre 1906,

elle exécute froidement l'Italie :

"Il n'y a pas lieu de dépenser de l'encre inutilement

pour décrire la traversée de l'Italie. Il a fait très chaud

puis froid - nous avons raté des trains - trouvé des hôtels –

& parcouru, ce faisant, l'Italie d'un bout à l'autre."

Il faut dire que voyager avec Virginia, cela devait être

quelque chose. D'aucuns la trouvaient horriblement snob,

moi je la trouve terriblement anglaise, à cette époque

où l'Angleterre était la première puissance économique et

militaire du monde et les Anglais qui voyageaient beaucoup

se sentaient partout chez eux.

Evidemment Virginia a une vision des Grecs modernes très

Woolfienne :

"Les Athéniens les plus pauvres - & tous ont l'air pauvre..."

ou encore :

"Les habitants d'Athènes ne sont naturellement pas plus

athéniens que moi. Ils ne comprennent pas le grec du

siècle de Périclès - lorsque je le parle."

C'était une époque où les classes moyennes n'existaient

pas encore, le grec et le latin constituaient la base de la

culture et de l'éducation comme à Cambridge où l'étude

du grec était incontournable.

Le seul regret pour cette magnifique édition provient encore

une fois du titre qui est inadapté. La référence à l’adolescence

est impropre, car elle suggère un unique souci chronologique

alors que dans l’édition originale le découpage est professionnel.

Comme le dit Mitchell A. Leaska dans la préface : « Cette première

chronique constitue, par conséquent, les débuts de l’apprentissage

de la future Virginia Woolf romancière qui, pour l’heure, est encore

Adeline Virginia Stephen et se prépare au métier d’écrivain. »



Jeudi 22 janvier 2009

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Voilà ce que j'en avais pensé :

"Je viens de terminer ma lecture du journal de jeunesse de Virginia, de 1997 à 1909.

Je referme le journal avec une envie profonde de lire son oeuvre, et j'ai commencé dès ce matin avec Orlando.

On y suit toute la construction des étapes d'une grande écrivain, les premiers essais de descriptions de paysage, de ses contemporains, de ce Londres victorien, de la haute bourgeoisie qu'elle fréquentait un peu malgré elle, qu'elle regarde avec un humour vif, ses vacances à travers l'angleterre, la Cornouilles, le Pays de Galles et d'autres, et ses voyages en Europe : Espagne et Portugal, Grèce, Turquie.

Des passages poignants, parfois, qui laissent transparaître sa personnalité à fleur de peau.

Ses premiers pas de critique littéraire, comment elle souffle sur la lecture de la Coupe d'Or d'Henry James, qu'elle a mis une semaine à lire (un livre admirable, par ailleurs, qui m'avait accupé un bon mois de juillet d'adolescence), sa fierté d'en faire son gagne pain.

Sa relation très forte avec sa soeur Vanessa, qui deviendra plus tard la peintre talentueuse Vanessa Bell.

Je recommande cette lecture, qui se déguste petit à petit, un grand air frais et vivant, qui nous montre à voir ce début de 20ème siècle frémissant, à travers les sens d'une jeune femme de lettres anglaise, assez fière d'être femme et d'être anglaise, du reste."

Woolfeur a dit…

Merci pour votre texte aussi talentueux que pertinent.
Ce qui m'a finalement le plus frappé c'est de retrouver aussi fortement Mrs Woolf chez Miss Stephen ainsi que l'incroyable maturité intellectuelle, littéraire et culturelle de Virginia.
Je vous souhaite de somptueuses journées de mots.

Anonyme a dit…

Merci!

A propos de mots, si celà vous dit, je vous invite à découvrir ma nouvelle histoire, qui débute aujourd'hui, en publication quotidienne.

Woolfeur a dit…

Merci pour l'invitation qui m'a fait grand plaisir. C'est amusant car sur un de mes blogs je raconte des histoires de B en ce moment. Mon B vient de la mer et du vent et c'est une femme évidemment...
Je vous souhaite plein de plaisirs de mots.

Anonyme a dit…

celà m'interesse! quel est ce blog? la coïncidence est assez drôle en effet!

Woolfeur a dit…

Oui, c'est bizarrement bizarre,
c'est la vie en somme...
L'adresse de mon blog principal où vous trouverez ma B est :

http://laportesansporte.blogspirit.com

Attention aux oreilles, je fais des essais de musiques en ce moment!

Anonyme a dit…

Bonsoir,
étant en train de travailler sur certaines nouvelles de Virgina Woolf à travers une étude comparative avec Luigi Pirandello et Anton Tchékhov, je me suis donc mise à effectuer quelques recherches sur internet qui m'ont conduite à votre blog très intéressant et qui révèle la passion, incarnée par la lecture, que vous possédez envers cette écrivaine.
Je voulais juste vous le signaler car j'avoue le ravissement qu'a été de lire ce blog me confirmant qu'un certain nombre de lecteurs de Virgina Woolf peuvent tomber sous le charme de cette écriture presque impressionniste {et du coup onirique}(du moins pour les nouvelles que j'étudie.)
J'avais lu et étudié en première année de faculté Mrs Dalloway et votre article au sujet de ce roman me donne l'envie de lire à nouveau cette oeuvre aussi je vous en félicite et vous en remercie.
J'ai également jeté un coup d'oeil (rapide je le reconnais mais j'y retournerai quand le temps me le permettra) sur votre blog: http://laportesansporte.blogspirit.com
et j'ai beaucoup apprécié cette association du verbe à l'image. Cela m'a rappelé mes anciens blogs où chaque texte d'auteur ou personnel était suivi d'une image reflétant l'impression suscitée et permettant surtout d'attirer l'œil comme les livres d'images poussent au premier âge les enfants à prendre des livres pour les lire.
Bref: je ne peux que vous souhaiter une bonne continuation.

~Ann~

Woolfeur a dit…

Bonjour Ann,
je viens seulement de découvrir votre commentaire et je tiens à vous remercier pour votre extrême gentillesse. Je suis fortement touché par votre appréciation élogieuse et je suis heureux de partager avec vous ma passion pour Virginia Woolf. Quand j’ai découvert votre texte je venais juste de lire l’émouvante nouvelle de Raymond Carver « Les trois roses jaunes » consacrée aux derniers jours d’Anton Pavlovitch Tchekhov et je serais bien sûr ravi
s’il existait une possibilité d’avoir accès aux résultats de vos éminents travaux.
Pour ce qui concerne Virginia Woolf, je suis bien sûr sous le charme de son écriture d’une intense subtilité poétique, mais je suis également en admiration devant la femme qu’elle était, son courage et sa prodigieuse intelligence…
Je vous remercie également pour vos propos sur les blogs où j’écris. J’ai fait des essais musicaux que j’ai rapidement abandonnés et régulièrement je me pose la question des illustrations qui renforcent ou qui polluent les textes, mais finalement je me dis que les livres aussi ont des couvertures et par exemple c’est ce que fait maintenant Gallimard en habillant les beaux livres de la nrf d’une jaquette de papier glacé. Ainsi le remarquable roman d’Ian McEwan « Sur la plage de Chesil » est parfaitement mis en valeur par la couverture bleue choisie par l’éditeur.
J’ai grandement apprécié l’intelligente douceur de votre écriture.
Au plaisir de vous lire.
Jean