mercredi 23 décembre 2009

La Maison hantée



La nouvelle tient une place importante dans l’œuvre
et dans la vie de Virginia Woolf car elle écrivait tout le temps
et notait régulièrement des idées, des sujets ou des trames
de « short stories ».

Son itinéraire littéraire est scandé par la parution de cinq recueils
de nouvelles dont La Maison hantée est le plus riche car il reprend
l’essentiel de Monday or Tuesday en le complétant de nouveaux
textes dont certains inédits.

1° Le mythique « Monday or Tuesday » est le seul volume
de nouvelles paru du vivant de Virginia Woolf, en 1921.
Monday or Tuesday est toujours disponible en anglais,
édité notamment par Hesperus Press Limited (Hesperus Classics)
ou par Dover Publications (Dover Thrift Editions).
A ma connaissance, il n’y a jamais eu de publication en français.

Ce recueil comprenait huit nouvelles :
- Monday or Tuesday (Lundi ou mardi), écrit en novembre
ou décembre 1920.
- A Haunted House (Une maison hantée), publié en1921.
- An Unwritten Novel (Un roman esquissé), publié en juillet 1920.
- The String Quartet (Le quatuor à cordes), publié en 1921.
- Kew gardens, publié en mai 1919 par la Hogarth Press.
- The Mark on the Wall (La marque sur le mur), écrit en été 1917.
- A society (Une société), publié en1921, non repris ultérieurement.
- Blue and Green (Bleu et vert), publié en1921, ne sera pas repris.


2° « The Haunted House and Other Short Stories» parait en 1943,
deux ans après la mort de Virginia Woolf.
Traduit par Hélène Bokanowski, il sera édité par les éditions Charlot
en 1946, sous le titre « La maison hantée ».
C’est une édition épuisée depuis longtemps et donc très rare.
Pendant longtemps deux seuls exemplaires étaient proposés par des
libraires spécialisés sur Internet dont l’un avait la couverture
abimée, je me suis donc procuré l’autre dont les pages n’étaient
même pas coupées.

La remarquable préface a été écrite par Léonard Woolf en 1943,
il explique parfaitement comment il a choisi les textes, dans le
prolongement de la volonté de Virginia qui avait décidé en 1940
de la publication d’un nouveau volume de nouvelles dont elle
prévoyait la sortie en 1942.

Le recueil « La maison hantée » est composé de trois blocs de
six nouvelles :

1) Les nouvelles déjà publiées dans Monday or Tuesday, à l’exception
de « A society » et de « Blue and Green » auxquelles Virginia ne
tenait pas vraiment ;

2) Six nouvelles déjà parues dans diverses revues entre 1922 et 1941 :
- The New Dress (La robe neuve), 1925.
- The Shooting Party (La partie de chasse), publiée en 1938.
- Lappin and Lapinova (Lappin et Lapinova), écrite en 1919
et publiée en 1939.
- Solid Objects (Objets massifs), octobre 1920.
- The Lady in the Looking Glass (La dame au miroir),
écrite en décembre 1927 et publiée en décembre 1929.
- The Duchess and the Jeweller (La duchesse et le bijoutier),
écrite en 1937 et publiée en 1938.

3) Et pour finir, six nouvelles inédites :
- Moments of Being (Moments de l’être), publié en janvier 1928.
- The Man who Loved his Kind (L’homme qui aimait son prochain),
écrit au printemps 1925.
- The Searchlight (Le projecteur), écrit en février 1939.
- The Legacy (Le legs), publié en 1943.
- Together and Apart (Ensemble et séparés), écrit au printemps
1925.
- A Summing Up (Mise au point), écrit au printemps 1925.


Lire et relire les dix huit nouvelles de ce volume conçu par Léonard
Woolf est un moment de grand bonheur et apporte une sensation
de plénitude.
A travers les variations de rythme et de plans composées par la
romancière, c’est toute l’œuvre de Virginia qui s’annonce, déjà
présente dans la recherche d’une sorte de dissonance fluide qui
à chaque lecture me surprend et m’émerveille.

Le mieux placé pour en parler, loin du verbiage asticotatoire de
certaines universitaires reste Léonard Woolf, le plus fidèle serviteur
de Virginia et de son œuvre :

« Toute sa vie, Virginia Woolf écrivit des nouvelles. Lorsqu’un sujet
lui passait par la tête, elle le notait grosso modo par écrit et rangeait
cette ébauche dans un tiroir. Si plus tard un éditeur lui demandait
une nouvelle et si elle se sentait d’humeur à l’écrire (ce qui était fort
rare), elle sortait l’une de ces ébauches de son tiroir et la récrivait,
souvent un très grand nombre de fois. Lorsqu’elle travaillait à un
roman, elle éprouvait également le besoin (c’était fréquent), de se
reposer l’esprit en faisant pendant quelque temps autre chose. Elle
écrivait alors un essai de critique ou bien retravaillait l’une de ces
nouvelles à l’état d’ébauche. »
(1943, préface de La Maison hantée, traduite par Hélène Bokanowski).


3° Les trois autres volumes de nouvelles publiées à titre posthume,
par la Hogarth Press : « The Death of the Moth », « The Moment »
et « The Captain’s Death Bed » seront également traduits en Français
par Hélène Bokanowski et intégrées avec la Maison Hantée dans un
vaste volume appelé « La mort de la phalène, édité par Le Seuil
en 1968 et régulièrement réédité dans la collection Points.


Les traductions les plus récentes des short stories de Mrs Woolf
sont l’œuvre de Pierre Nordon qui a publié en 1993 dans Le Livre de
Poche un recueil bilingue de douze textes sous le titre de "Kew
Gardens", avec des renvois et des notes sur la traduction fort
enrichissantes.

On retrouvera ensuite dix neuf nouvelles de Virginia dans l’anthologie
que lui consacre Pierre Nordon : « Romans et nouvelles » édité le 12
décembre 2002 par le Livre de Poche dans la collection Pochothèque.
En dehors des nouvelles traductions dues à Pierre Nordon et Pascale
Michon, l’intérêt de cette compilation est de pouvoir découvrir en
français les deux textes bannis par Léonard Woolf « Une société »
ainsi que « Bleu et vert ».


Une façon de boucler la boucle…

Comme disait Mrs Dalloway (who was always so charming) dans
« La robe neuve » :

« But it’s too early to go ! »

Mercredi 23 décembre 2009

dimanche 20 décembre 2009

Nouvelles anglaises



Ce très joli recueil de nouvelles a un triple rapport avec

Virginia Woolf :

1° Il s’agit d’un vaste panorama de la littérature anglaise,

depuis le 13ème siècle et l’auteur inconnu de « Sire Gauvain »

jusqu’au 20ème siècle avec notamment D. H. Lawrence,

Katherine Mansfield et Evelyn Waugh, en passant par les

grands classiques Walter Scott, Thomas de Quincey et

Charles Dickens, sans oublier les Hardy, Stevenson, Wilde

ou encore Conrad… Que du beau monde !

2° Le choix des nouvelles et la préface du livre sont l’œuvre

d’Hélène Bokanowski, grande spécialiste de la littérature

anglaise et de l’œuvre de Virginia dont elle a traduit en Français

pratiquement toutes les nouvelles.

3° Parmi les vingt deux short stories présentées, figure en bonne

place « La Marque sur le Mur » de Mrs Woolf.


Ces Nouvelles anglaises parues chez Seghers en 1963, constituent

le septième volume de la collection MELIOR que l’éditeur présente

comme « populaire par son prix et luxueuse par sa présentation ».

L’exemplaire que je me suis procuré dans une librairie spécialisée

est effectivement imprimé sur beau papier et relié sous jaquette

rhodoïd qui permet une conservation parfaite.


Les nouvelles sont présentées par ordre chronologique et chaque

texte est précédé d’une courte biographie.

Dans sa très fine préface, Hélène Bokanowski explique son souci

de mieux faire connaître les auteurs anglais en France et elle cite

notamment le cas de Virginia Woolf : « …sans passer inaperçue,

ne reçut pas l’accueil mérité par celle que les Anglais considèrent

eux, comme l’un des grands, sinon le plus grand romancier de la

première moitié du siècle. Aujourd’hui, on reparle d’elle, car on s’est

aperçu qu’elle fut, plus ou moins directement, à l’origine de cette

école dite du nouveau roman …. elle fut la première à donner à des

personnages la dimension qu’ils prennent quand leurs rapports avec

autrui et le monde extérieur se définissent par le flux du

subconscient plutôt que par l’action. »


« The Mark on the Wall » est une nouvelle mythique de Virginia

Woolf, car c’est tout bonnement la première à être publiée, en 1917.

Auparavant, Virginia avait seulement publié son premier roman,

« The Voyage Out », en 1915.

The Mark on the Wall a aussi une forte portée symbolique,

car ce fut la première publication de la Hogarth Press, la

maison d’édition des Woolf.


La nouvelle traduite par Hélène Bokanowski sous le titre

« La Marque sur le Mur » sera ensuite reprise dans le recueil

« Une Maison hantée » édité par Charlot en 1946, puis dans

le florilège intitulé « La Mort de la phalène » édité par Le Seuil,

en 1968.


Pour parler de la nouvelle, avec Virginia, c’est simple, la magie

est immédiate, il suffit de l’écouter parler d’un arbre, d’un simple

arbre de bois :


J’aime à penser à l’arbre en soi : d’abord à cette compacte et sèche

sensation d’être de bois ; puis au grincement de l’orage, et puis

à ce lent, à ce délicieux suintement de la sève.

J’aime à songer aussi à l’arbre dans un champ par les nuits d’hiver,

lorsque toutes ses feuilles repliées sur elles-mêmes, il dissimule

sa fragilité au fer des projectiles lunaires ; mât dénudé, planté

dans une terre qui tombe, tombe toute la nuit.

Le chant des oiseaux doit lui sembler très fort, étrange aussi

en juin ;

et les pieds des insectes doivent lui donner froid lorsqu’ils

progressent laborieusement le long des plis de son écorce, ou

qu’ils se chauffent au soleil sur la mince et verte tente de ses

feuilles, regardant droit devant eux, avec leurs yeux à facettes

rouges…



Que dire de plus ?

- Rien !

- Ou plutôt Merci.


Dimanche 20 décembre 2009

samedi 24 octobre 2009

La Promenade au phare



Couverture de l’édition de 2009

Après La Chambre de Jacob en 1922, puis Mrs Dalloway en 1925, La Promenade au Phare publié en 1927 par la Hogarth Press, complète magnifiquement la trilogie magique des romans « modernistes » de Virginia Woolf.
C’est celui qui a reçu l’accueil le plus triomphal de la part de la critique anglaise et américaine. Il sera également plébiscité par les lecteurs puisque les ventes de la première année dépasseront le total atteint par La Chambre de Jacob et Mrs Dalloway.


Un livre qui comme les précédents, ne s’embarrasse pas trop des conventions du genre romanesque et qui comme le souligne très judicieusement Françoise Pellan dans sa préface à l’édition française de 1996, emprunte « à l’art pictural le principe de sa composition, elle se présente sous la forme d’un triptyque. Le premier volet baigne dans la chaude lumière d’un soir de septembre, quelques années avant la guerre de 14-18. Le panneau central a la couleur des nuits de tempête zébrées d’éclairs. Le second volet doit sa lumière crue au soleil d’un matin d’été, juste après la guerre. »



- La 1ère traduction en français de To the Lighthouse par M. Lanoire sera éditée par Stock en 1929, sous le titre « La Promenade au phare » Cette même traduction sera reprise dans le 1er tome de L’œuvre romanesque publiée par Stock en 1973, avec une remarquable préface de Monique Nathan.
Cette même version avait fait l’objet en 1957 d’une édition limitée à 3300 exemplaires numérotés dans la collection Stock reliée. L’artiste Jeanne Pécheur a orné la reliure et les gardes des ses dessins (superbes !), d’un document photographique Roger Viollet et d’un portrait inédit de Virginia Woolf par Gisèle Freund. J’ai eu la chance de me procurer l’exemplaire n° 1593…

- La deuxième traduction de To the Lighthouse, sous le titre de « Voyage au Phare » sera l’œuvre de Magali Merle en 1993 pour le recueil « Romans & Nouvelles » publié dans la collection Pochothèque du Livre de Poche, avec une préface de Pierre Nordon

- La troisième traduction en français, sous le titre « Vers le Phare » sera l’œuvre de Françoise Pellan qui rédigera également la préface du livre publié en 1996, dans la collection Folio classique chez Gallimard.

- La toute dernière version de 2009, sous le titre « Au Phare » bénéficie d’une nouvelle traduction d’Anne Wicke, dans la merveilleuse collection La Cosmopolite chez Stock.


Un livre qui est une chronique du temps qui passe sur une maison de vacances située sur une île au large de l’Ecosse.

Dans la première partie, la plus conséquente qui est intitulée « La Fenêtre », la maison est habitée par beaucoup de résidents où on reconnait facilement les nombreux parents de Virginia et leurs amis qui comme Henry James les visitait pendant les vacances à Saint Yves. Toute cette partie est irradiée par la grâce de Mrs Ramsay qui est animéee du même rayonnement qui émanait de Julia Stephen la mère de Virginia.

Dans la deuxième partie, très courte, « Le Temps passe » Mrs Ramsay n’est plus là, partie trop tôt comme la mère de Virginia, la guerre est passée par là, la maison est à l’abandon, livrée à la force de la nature.

Et enfin dans la troisième et dernière partie intitulée « Le Phare » On retrouve Mr Ramsay, le père toujours aussi admirable et insupportable avec son égoïsme supérieur et son inaltérable besoin d’être aimé et reconnu.

La Promenade au Phare, pour reprendre le titre de la traduction initiale (ma préférée, même si la dernière est très bien !) est à la fois le roman le plus autobiographique de Virginia Woolf, celui qui lui a apporté le plus grand succès et qui a été couronné par le prix Femina en 1928, et aussi son préféré. Elle le considérait comme le meilleur de ses livres, plus cohérent que La Chambre de Jacob et moins superficiel que Mrs Dalloway.

Cette Promenade dans le temps jusqu’au Phare, avec sa décomposition temporelle et la dépersonnalisation du personnage principal Mrs Ramsay qui apparait parfois comme une sorte de médium révélant les grands thèmes de l’œuvre Woolfienne : la vie, l’amour, le chaos, la fuite du temps, l’absence et la mort, est une œuvre majeure qui annonce les futures créations de Virginia et notamment « Les Vagues »



Pour finir je dirai juste un mot des éditions anglaises qui, même en format de poche, sont très soignées et fort peu couteuses. Par exemple l’édition de 1996 de To the Lighthouse dans la collection Popular Classics de Penguin Books qui reprend la version intégrale du texte de 1927 est illustrée par la reproduction d’un très joli tableau de Dame Laura Knight qui a pour titre : Evening on the Beach


Vendredi 23 octobre 2009

lundi 6 juillet 2009

Virginia Woolf – Qui êtes-vous ?


Couverture de l’édition française


Cet ouvrage de Phillys Rose, traduit de l’américain

par Thérésa de Cherisey est passionnant et original.

En effet Phillys Rose possède des connaissances

encyclopédiques sur Virginia Woolf et son époque

et son exposé est remarquablement clair et pédagogique.


Son point de vue est intéressant car pour elle l’étude

de l’œuvre de Virginia est inséparable de l’étude de sa vie.

Et il est vrai que l’éclairage psychologique apporté par

Phillys Rose permet de beaucoup mieux appréhender

la globalité de l’œuvre de Virginia Woolf.


Il s’agit d’un livre paru en 1977 aux Etats Unis, la version

française en format de poche sera publiée en 1987 par

l’éditeur lyonnais « la manufacture »



Cette biographie est moins connue que les grands classiques

écrits en France par Monique Nathan, Béatrice Mousli,

Claudine Jardin ou Viviane Forrester ou bien en Angleterre

par Quentin Bell, Nigel Nicolson, Hermione Lee ou Jane Dunn.


Elle est cependant extrêmement enrichissante et complète

notamment par le choix des thèmes traités :

- Saint Yves et Kensington ;

- Lytton Strachey et Leonard Woolf ;

- L’amour des femmes ;

- Vita Sackville-West et l’androgynie ;

- Une vie sans avenir, etc.



Phillys Rose consacre également un chapitre

à chacun des ouvrages les plus importants de

l’écrivaine anglaise.

Elle considère que « La Promenade au phare

est le roman le plus franchement autobiographique

de Virginia qui se mettant à écrire sur ses parents

et sur son passé, se trouve inévitablement confrontée

à la question centrale et angoissante de sa vie :


peut-on être à la fois une femme, telle que les femmes

ont été culturellement définies, et une artiste ? »




A ma connaissance, l’édition de 1987 est épuisée depuis

longtemps, mais on peut encore trouver des exemplaires

en excellent état sur différents sites de livres d’occasion,

à un prix très raisonnable.


C’est un livre qui m’a enchanté et que je recommande

à tous les Woolfistes débutants ou chevronnés…



Lundi 6 juillet 2009

vendredi 5 juin 2009

1882


L’incontournable biographie de Virginia Woolf, par son neveu Quentin Bell


Le 25 janvier 1982, naissance au 22 Hyde Park Gate, à Londres,
d' Adeline Virginia Stephen, troisième de quatre enfants,
issus du mariage de Sir Leslie Stephen et de Julia Prinsep Duckworth, née Julia Jackson (1846 -1895).

Les parents de Virginia étaient tous deux veufs lorsqu’ils se marièrent : ainsi leur maison regroupait les enfants de trois mariages différents.

Les enfants de Julia et de son premier époux Herbert Duckworth : George Duckworth (1868 - 1934) ; Stella Duckworth (1869 - 1897) ;
et Gerald Duckworth (1870 - 1937).

La fille de Leslie et de sa première épouse Minny Thackeray, Laura Makepeace Stephen fut diagnostiquée handicapée mentale et vécut avec eux avant d’être placée dans un asile en 1891 jusqu’à la fin de ses jours.

Enfin, les enfants de Leslie et Julia : Vanessa (1879 - 1961) ; Thoby (1880 - 1906) ; Virginia (1882 - 1941) et Adrian (1883 - 1948).



Sir Leslie Stephen, écrivain, éditeur et alpiniste, était veuf de la fille aînée du romancier William Makepeace Thackeray.
Après avoir enseigné à Cambridge, il s’orienta vers le journalisme littéraire puis après avoir publié une imposante Histoire de la pensée anglaise au 18ème siècle, il se consacra entièrement à partir de 1882 à l’œuvre de sa vie, le « Dictionary of National Biography » dont il rédigea lui-même 378 articles.

Julia Stephen était la fille d’une des six sœurs Pattle, connues pour leur beauté et leur implication dans la vie intellectuelle de la société victorienne, comme le salon tenu au milieu du XIXe siècle par sa tante Sarah Prinsep.


Virginia fut éduquée par ses parents à leur domicile du 22 Hyde Park Gate, Kensington dans une ambiance littéraire de la haute société.

Les écrivains Henry James, George Henry Lewes, Georges Meredith et James Russell Lowell (le parrain de Virginia) faisaient entre autres partie des connaissances de ses parents, ainsi que la septième sœur Pattle, la photographe Julia Margaret Cameron (une autre tante célèbre de Julia morte en 1879)


Lundi 27 avril 2009

vendredi 1 mai 2009

Le Faux Roman


Couverture de l’édition de 1995



Le Faux Roman publié en janvier 1995, par les éditions Mille et

une nuit, se présente comme un mini livre de quarante huit pages,

de petit format avec une fort jolie couverture et de remarquables

illustrations de Marion Bataille.

La traduction est de Guillaume Villeneuve et le titre original :

An Unwritten Novel.



En fait, il s’agit d’une nouvelle publiée initialement en 1921,

dans le recueil « Lundi ou Mardi », le seul ensemble de nouvelles

publié du vivant de l’écrivain.


On retrouve « An Unwritten Novel » dans le recueil « La mort

de la phalène » publié par les Editions du Seuil en 1968,

avec une traduction d’Hélène Bokanowski, sous le titre :

« Ce qui n’a pas été écrit ».


Une troisième version est publiée en 1993 par la Librairie Générale

Française, « Un roman qu’on n’a pas écrit » est le titre, le plus

proche de l’original, de la traduction de Pascale Michon.


La grande « Woolfiste » américaine Phillys Rose explique bien

le cheminement de la réflexion de Virginia sur son art.

Après Nuit et jour, un beau roman de facture classique,

achevé en 1918, elle a envie de devenir elle-même.

En 1919 elle publie dans le supplément littéraire du Times

« La Fiction moderne ». C’est un essai critique qui annonce

la prééminence de l’inspiration sur la forme traditionnelle

des écrivains réalistes.

L’illustration des théories de Virginia apparaitra dans ce que

Phillys Rose appelle « Le Roman non écrit » en 1921 puis

dans la Chambre de Jacob en 1922.

Dans les deux cas, en effet, Virginia Woolf présente la nature

humaine sous une forme plutôt abstraite.


Le principal intérêt du "Faux Roman" est donc de voir à l’œuvre

l’apprentissage par Virginia d’un style elliptique qui, pour Phillys

Rose, a été influencé par les premiers poèmes d’Eliot.


C’est just le début de la magie…



Samedi 2 mai 2009

dimanche 29 mars 2009

Mrs Dalloway

« Je suis très, très contente que le livre en thaï te plaise...
Oui, bien sûr je peux te dire le nom de l'éditeur et de traducteur. Ce livre est publié pour la première fois l'année dernière ; l'éditeur s'appelle "Kombang" et le traducteur s'appelle "Dolasit Bang-kom-bang". » Apinya.


Un livre qui est la merveille des merveilles.
Ecrit en continu sans chapitre ni séparation, comme une phrase unique, comme la vie qui ne s’arrête jamais.

Un livre conçu en automne 1920, alors que l’écriture de la Chambre de Jacob commence, qu’elle finira à la fin de l’année 1924 et qui sera publié par la Hogarth Press au début de 1925.


- La 1ère traduction en français de Mrs Dalloway par S. David sera éditée par Stock en 1929, avec une préface d’André Maurois. Elle sera éditée en 1956, dans Le Livre de Poche, avec en couverture un joli dessin en couleur d’un carrefour de Londres. Cette même version sera reprise en 1973, dans le 1er volume de L’œuvre romanesque et sera réédité par Le Livre de Poche en 1982.

- La deuxième traduction en français sera l’œuvre de Pascale Michon en 1993 pour le recueil « Romans & Nouvelles » publié dans la collection Pochothèque du Livre de Poche, avec une préface de Pierre Nordon

- La dernière version de 1994 bénéficie d’une nouvelle traduction par Marie-Claire Pasquier et d’une longue préface de Bernard Brugière, dans la collection Folio chez Gallimard.


Un livre qui est celui d’une journée d’été à Londres, en juin 1933 qui commence avec Clarissa Dalloway, le principal protagoniste et le fil rouge du récit et qui se finit avec la grande soirée mondaine qu’elle donne chez elle.

Pendant cette journée, nous suivons dans les rues de Londres des personnages proches de Mrs Dalloway, son mari Richard, puis sa fille Elisabeth, puis Peter Walsh, éperdument amoureux de Clarissa en 1890 qui revient des Indes.

Il y a aussi quelques relations mondaines et puis un des personnages importants qui arrive là comme un homme vert débarquant de Mars, c’est Septimus Warren Smith qui incarne la poésie pure qui sombre dans la folie.


Pourquoi aime-t-on autant Clarissa Dalloway ? Surement parce qu’elle est très femme : belle, subtile, élégante avec une prescience de l’instant. Une femme très sensible qui a préféré la sécurité auprès de Richard Dalloway plutôt que l’aventurier Peter Walsh son grand amour qui la fait encore frissonner vingt ans après.

Mrs Dalloway c’est un peu le livre de Virginia, où on trouve beaucoup d’elle, des gens, des lieux et des situations qu’elle a connus. On retrouve aussi des personnages comme si le livre était un album de famille, de vie.

Ainsi Septimus Warren Smith et sa charmante épouse Rezia habitent le quartier de Bloomsbury, là où se trouve l’hôtel de Peter Walsh. C’est dans ce même quartier de Bloomsbury que Léonard et Virginia Woolf se sont installés en 1923, au 52 Tavistock Square.

De même Mrs Durrant et Clara, la mère et la fille, sont directement issues de « La Chambre de Jacob » où Clara était le grand amour romantique de Jacob…

Et puis il y a Sally, l’espiègle et originale ancienne grande amie de Clarissa qui m’évoque le personnage de Lily la jeune femme peintre de « To the Lighthouse” Et puis Virginia connaissait déjà Vita Sackville-West, même si leur liaison amoureuse ne commencera vraiment qu’en décembre 1925.


En relisant Mrs Dalloway dans la traduction initiale que je préfère, j’ai redécouvert des éléments plein de charmes. Ainsi Clarissa Dalloway qui a des traits communs avec Virginia mais qui ressemblait à une amie de sa mère,
« avait de jolies mains, de jolis pieds et elle s’habillait bien »

Un peu plus loin, Septimus Warren Smith entend un couple de moineaux :
« et ils chantèrent en mots grecs, avec des voix insistantes et perçantes, perchés sur des arbres, de l’autre côté de la rivière, dans la prairie de la vie, où marchent les morts, qu’il n’y a pas de mort. »

Passage extraordinaire de représentation de la maladie de Virginia qui entendait le chant des oiseaux en grec, de la vie et de la mort, des prairies où elle aimait se promener et de la rivière où elle choisit de quitter la vie…


La promenade de Septimus et de Rezia à Regent’s Park génère des nuages de poésie. Et tandis que sa femme essaye désespérément d’attirer son attention, Septimus entend une voix :

« - Regarde ! ordonnait l’invisible, la voix qui maintenant communiquait avec lui ; lui, Septimus, le plus grand parmi les hommes, récemment passé de la vie à la mort, Seigneur venu pour renouveler le monde, étendu comme un manteau, comme un tapis de neige immaculé sous le soleil, souffrant un sacrifice jamais consommé, bouc émissaire, éternelle victime. Mais il ne voulait pas, gémit-il, éloignant d’un mouvement de la main cette souffrance éternelle, cette solitude éternelle.
- Regarde ! répéta-t-elle, car il ne devait pas parler tout seul quand il était dehors.
- Oh ! Regarde ! implora-t-elle. Mais qu’y avait-il à regarder ? Quelques moutons. C’était tout. »



Clarissa comme Virginia souffre de sa frigidité avec les hommes, avec son mari. Elle s’interroge sur son attirance pour le charme de certaines femmes :
« Mais l’amour (pensait-elle, en ôtant son manteau), l’amour entre femmes. Voilà, par exemple, Sally Seton ; ses rapports autrefois avec Sally Seton. N’était-ce pas de l’amour, après tout ? »


C’est finalement très difficile de parler de ce livre qui est un enchantement, un fait magique. C’est la musique de l’âme. Pour moi c’est l’esprit de Virginia son talent et son amour des mots qui nous sont livrés en quelques cent cinquante pages.

La dernière page du livre, se confond avec les derniers instants de la soirée. Les deux êtres que Clarissa a aimés sont là, Sally et Peter ont attendu ensemble que Clarissa revienne les voir.

Sally se lève pour aller prendre congé de Richard Dalloway.

« Je viens, dit Peter, mais il resta encore un peu.
Quelle est cette crainte ? se demandait-il. Ce ravissement ? C’est Clarissa, dit-il.
Elle était là. »


Pour finir je dirai juste un mot des éditions anglaises qui, même en format de poche, sont très soignées et fort peu couteuses. Par exemple l’édition 2000 de Mrs Dalloway dans la collection Modern Classics de Penguin Books comprend un plan de Londres des années 20, une longue introduction d’Elaine Showalter de Princeton University, une bibliographie, une présentation de Stella McNichol, des notes en fin de volume et un appendice présentant les corrections apportées aux éditions de 1925 et de 1947.

Dimanche 29 mars 2009

dimanche 8 mars 2009

L’œuvre romanesque - vol 1


Alors qu’il y a eu une importante quantité de biographies

et d’essais inspirés par Virginia Woolf sans compter les

différentes éditions, extractions ou compilations réalisées

à partir des ses journaux, bizarrement les tentatives visant

à réunir ses « œuvres complètes » sont extrêmement rares

pour un écrivain d’une telle stature.


En effet il y a eu la superbe édition chez Stock, entre 1973

et 1979, de L’œuvre romanesque de Virginia Woolf en trois

beaux volumes avec une couverture entoilée et une jaquette

en papier glacé joliment illustrée par des portraits de l’artiste.

Vingt ans plus tard, donc en 1993 Le Livre de Poche publiera

dans la collection Pochothèque les « Romans & Nouvelles »

de Virginia Woolf en reprenant les six derniers romans et une

sélection d’une vingtaine de nouvelles.

Et puis… C’est tout !

C’est effectivement bien peu pour un auteur majeur même si

on peut se consoler en sachant que l’édition des œuvres

complètes est en préparation chez Gallimard dans la prestigieuse

« Bibliothèque de la Pléiade »



L’œuvre romanesque publiée par Stock n’est plus disponible

depuis longtemps chez l’éditeur. On peut la trouver sur les sites

Internet ou dans les librairies spécialisées, je crois même que j’ai

trouvé un des volumes au Marché aux Puces de Saint Ouen.

Le premier volume est le plus facile à trouver, par contre souvent

les jaquettes sont abimées ou manquantes.


J’aime bien mon volume 1 qui a été personnalisé par un certain John.

Sur la jaquette, il a inscrit « I love Marie Lou »
et sur la page de garde :

« For Marie Lou –

un monde –

Son monde ?

des mondes

démons ?

John

noël 1974 »

Je trouve que c’est émouvant.


Le premier volume édité en 1973, commence par une remarquable

préface de Diane de Margerie. Il comprend les trois romans qui ont

suivi « The Voyage out » et « Nuit et jour ».

A savoir : La chambre de Jacob, traduction de Jean Talva ;

Mrs Dalloway : préface d’André Maurois et traduction de S. David ;

La promenade au phare, préface de Monique Nathan et traduction

de Maurice Lanoire.


Ce volume initial de l’œuvre romanesque m’a donc permis de

découvrir une troisième traduction de la Chambre de Jacob après

celle de Magali Merle pour l’édition de poche en 1993 et la toute

récente version d’Agnès Desarthe pour la réédition en 2008 dans

la collection « La Cosmopolite ».

Cette dernière apportait une touche de modernité et une sorte

de fluidité qui rendait la lecture plus agréable. Cependant, c’est

avec la traduction de Jean Talva que j’ai pris le plus de plaisir.

Je trouve que le texte a plus de puissance et que l’emploi

de tournures anciennes et d’expressions désuètes permet

de se rapprocher du texte écrit par Virginia Woolf et de

l’ambiance lexicale et linguistique du début des années Vingt.

Trois romans de Virginia dans un seul très joli livre,

c’est trois fois plus de bonheur !


Dimanche 8 mars 2009

jeudi 22 janvier 2009

Journal d’adolescence


En avril 2008, nous avons eu droit à la superbe réédition

du Journal d’adolescence de Virginia Woolf dans la collection

« La Cosmopolite » aux éditions Stock.

Il s’agit d’un magnifique volume de 502 pages, agrémenté

d’un arbre généalogique détaillé qui permet de mieux situer

la nombreuse parenté de Virginia.

La couverture reprend le célèbre portrait photographique

exécuté en 1902 par George Charles Beresford, alors que

l’édition anglaise la plus récente publiée par Pimlico en 2004

est illustré par le cliché de 1902 représentant Virginia avec

son père Sir Leslie Stephen (Cliché de la note du 3 novembre

2008 : Virginia Woolf en 2008)


Le Journal d’adolescence (1897-1909) est après la publication

de 1993, la deuxième édition française du texte original publié

par la Hogarth Press en 1990 sous le titre :

« A Passionate Apprentice : The Early Journals, 1897-1909 »


La traduction est de Marie-Ange Dutartre et ce Journal contient

une brève présentation de Geneviève Brissac et surtout la très

riche préface de Mitchell A. Leaska pour l’édition anglaise de 1990.


La lecture de ce journal qui se situe chronologiquement entre

Le journal de Hyde Park Gate (L’enfance) et le Journal intégral

de l’âge adulte, est un pur bonheur, tellement la fantaisie et la

justesse de Virginia Woolf sont déjà présents en toute liberté.


J’adore quand Miss Stephen raconte le voyage qu’elle fit en

Grèce, accompagnée de ses frères, sa sœur et Violet Dickinson.

Virginia n'a que 24 ans mais la précision de son style est

déjà inimitable. Arrivée à Olympie, le 14 septembre 1906,

elle exécute froidement l'Italie :

"Il n'y a pas lieu de dépenser de l'encre inutilement

pour décrire la traversée de l'Italie. Il a fait très chaud

puis froid - nous avons raté des trains - trouvé des hôtels –

& parcouru, ce faisant, l'Italie d'un bout à l'autre."

Il faut dire que voyager avec Virginia, cela devait être

quelque chose. D'aucuns la trouvaient horriblement snob,

moi je la trouve terriblement anglaise, à cette époque

où l'Angleterre était la première puissance économique et

militaire du monde et les Anglais qui voyageaient beaucoup

se sentaient partout chez eux.

Evidemment Virginia a une vision des Grecs modernes très

Woolfienne :

"Les Athéniens les plus pauvres - & tous ont l'air pauvre..."

ou encore :

"Les habitants d'Athènes ne sont naturellement pas plus

athéniens que moi. Ils ne comprennent pas le grec du

siècle de Périclès - lorsque je le parle."

C'était une époque où les classes moyennes n'existaient

pas encore, le grec et le latin constituaient la base de la

culture et de l'éducation comme à Cambridge où l'étude

du grec était incontournable.

Le seul regret pour cette magnifique édition provient encore

une fois du titre qui est inadapté. La référence à l’adolescence

est impropre, car elle suggère un unique souci chronologique

alors que dans l’édition originale le découpage est professionnel.

Comme le dit Mitchell A. Leaska dans la préface : « Cette première

chronique constitue, par conséquent, les débuts de l’apprentissage

de la future Virginia Woolf romancière qui, pour l’heure, est encore

Adeline Virginia Stephen et se prépare au métier d’écrivain. »



Jeudi 22 janvier 2009