mercredi 7 avril 2010

Une prose à l’épreuve du réel - Trois interventions à propos de Virginia Woolf


Couverture de l’édition originale de 2003


Cet ouvrage de Dominique Hénaff est intéressant

et original car il procède d’une étude philosophique

de trois des principaux ouvrages de Virginia Woolf :

La Promenade au phare, les Vagues et Entre les actes.



Ce livre publié en 2003 par l’éditeur lyonnais Horlieu éditions

est la compilation de deux interventions de l’auteure à des

séminaires de travail sur la philosophie qui se sont tenus à Lyon,


en 1993 : « La Promenade au phare de Virginia Woolf –

Transcendance ou généricité » ;


puis en 1994 : « Communauté du vrai, déliaison – Virginia Woolf

et l’exposition de la langue comme merveille »


et en 2000, un essai (épuisé aujourd’hui) également édité par

Horlieu : « Changer le désastre en catastrophe - Virginia Woolf

dans le siècle »


Comme j’ai éprouvé de grandes difficultés à suivre l’analyse

philosophique de Dominique Hénaff visant à démontrer le

platonisme de Virginia Woolf, je préfère laisser l’auteure

présenter son ouvrage :


« Peut-être que ces trois textes n’existent — modeste témoignage —

que pour saluer la jeune Virginia Stephen. Elle qui traînée de force

dans une soirée mondaine par un demi-frère équivoque qui voulait

se faire « mousser » (Girl is phallus), déclarait benoîtement à un

parterre d’inénarrables Ladies l’interrogeant sur son activité

quotidienne (jouez-vous de la musique, faites-vous du tricot ?)

qu’elle passait son temps à lire Platon :


« Moi je lis Platon. Et vous-même, vous ne connaissez pas ?

Comment peut-on vivre sans avoir lu Platon ? ».


Car elle savait, la jeune Virginia, que la question philosophique

dernière — tramée dans des systèmes de pensée d’une complexité

inouïe — est bien celle-ci : qu’est-ce que vivre ?


Qu’est-ce que vivre, non simplement dans le train du monde comme

il va, mais aussi en exception à la platitude répétitive et oppressive

des jours, quand vous transit l’éclair extatique d’une vision, ou que

la certitude patiente d’un travail à venir vous saisit.


Le long détour soustractif d’une pensée œuvrante, noué à la

surrection extatique d’une contemplation, dans la traverse active

et instruite du monde, tel aura été ce « quelque chose d’abstrait,

dans les landes, dans le ciel », que Woolf disait chercher, dans le

compagnonnage de Platon, Lucrèce, Shakespeare, Dante, et

quelques autres.


Ces trois conférences se seront essayées à en retrouver l’écho.

Non pour « rationaliser la machine inhumaine » qui conduit notre

incertain aujourd’hui, mais pour l’inciser de ce fragment que

l’artiste de prose anglaise nous aura légué, à nous qui durons,

toujours. » Dominique Hénaff.




A ma connaissance, la très jolie édition de 2003 n’est pas encore

épuisée et on trouve également des exemplaires

en excellent état sur différents sites de livres d’occasion.


C’est un livre d’un accès difficile pour les non spécialistes

mais qui enchantera surement les lecteurs possédant les clés

de la démarche et du vocabulaire philosophique.


Mercredi 7 avril 2010

6 commentaires:

Allie a dit…

Il m'a l'air plus difficile d'accès celui-ci... je ne connais pas suffisamment Woolf pour me lancer dans un tel volume.

Woolfeur a dit…

Coucou Allie
Oui tu as raison, c'est un livre difficile à lire qui ne m'a rien appris sur Virginia Woolf ni sur son oeuvre. Comme j'essaye de lire intégralement tout ce qui parle de Virginia, de près ou de loin, il est inévitable que de temps en temps je tombe sur des portes sans clef. Merci pour ta visite, j'espère que le printemps est revenu dans ton pays qui est une immensité.

Allie a dit…

Eh non, c'est toujours l'hiver! ;)
Mais on en profite pour lire tout notre soûl, ce qui n'est pas plus mal ;)

Woolfeur a dit…

Génial! Ce doit être comme dans les films, avec les ours, les chiens de traineaux et le bois omniprésent sous toutes ces formes...
Je connais mal la littérature de ton pays et uniquement des anglophones : Saul Bellow, Alice Munro, Alissa York dont j'ai adoré "Amours défendues" et surtout Margaret Atwood qui est pour moi la plus grande, après Joyce Carol Oates.
Ici il fait beau et entre deux pages je t'adresse un éclat d'azur.

Allie a dit…

C'est drôle, moi je connais assez mal la littérature canadienne anglophone. Je prends en note Alyssa York dont j'ai aussi un autre livre à lire. Si la littérature québécoise t'intéresse, sur mon blogue tu peux cliquer sur "Québec" dans les tags à droite, tu en auras plusieurs :)
(Sans vouloir te désillusionner, je n'ai jamais vu d'ours de ma vie, je n'ai jamais fais de traîneau à chiens - même si j'aimerais bien!) :))

Woolfeur a dit…

Coucou Allie,
merci pour ta réponse si gentille.
Je ne manquerais pas de regarder les auteurs du Québec sur ton blog qui est si accueillant et si bien organisé. C'est vrai que ma vision du Canada est aussi phantasmatique que pittoresque... C'est de la faute à mon imagination et puis aussi sûrement grâce à Etolane, Princesse des glaces et Reine de la blogosphère...
En tout cas, j'ai beaucoup apprécié la force et le caractère des paysages que tu montres, tu as la chance d'habiter une magnifique région.
Pensées de lettres et de signes